La Femme qui décida de passer une année au lit (The woman who went to bed for a year) – Susan Towsend – traduction de l’anglais de Fabienne Divigneau
Eva a cinquante ans, elle est mariée à Brian, astronome, et a deux jumeaux surdoués (Brain junior et Brianne, quelle imagination !).
Le jour où ces deux cerveaux partent pour l’université, elle rentre chez elle, remarque une tache de soupe à la tomate sur un fauteuil qu’elle avait retapissé elle-même. Et là, c’est la goutte (de soupe ?) qui fait déborder la casserole le vase.
Elle monte dans sa chambre et décide de ne plus quitter son lit.
Dépression à cause du départ de ses chérubins du nid familial ? C’est ce que tout le monde va penser. Son idiot de mari en premier qui s’inquiète surtout de son petit confort. Mais qui donc va tenir la maison, préparer ses repas ? Il trouve que son égoïste de femme exagère vraiment.
Pourtant, le malaise d’Eva est profond. Elle ne pleure pas le départ de ses enfants. D’ailleurs elle dit : « dès l’instant où ils sont nés, j’ai compté les jours qui restaient avant leur départ à l’université ! Je me sentais esclave de deux extraterrestres. Je ne souhaitais qu’une chose : me mettre au lit toute seule et y rester aussi longtemps que je le voudrais ».
Voilà, ils sont partis et elle tient sa promesse.
Ce roman très drôle pourrait être simplement une anglaiserie sur une femme au foyer qui craque et dont l’entourage réagit plus ou moins bien, avec nombre de personnages incongrus.
Mais c’est plus que cela.
Sue Townsend dresse le portrait d’une femme au foyer qui en a assez du manque de considération de sa famille, mais aussi du mal-être du monde. Elle a toujours été soumise, effacée, mais là, elle décide pour elle-même et son refus de quitter son lit va faire changer les relations qu’elle a avec son entourage mais aussi avec l’extérieur.
Car cette situation étrange ne manque pas d’interroger le voisinage et même plus loin.
Une foule va finir par faire la queue sous sa fenêtre en attente de conseils, ou simplement de la voir, telle une sainte.
On pourrait croire que de son lit (allez, disons un 140×200), son univers se rétrécit. Et bien non ! Elle rencontre plus de gens, échange plus d’idées, qu’elle ne l’avait fait durant toute sa vie à l’extérieur.
Au final cette histoire a priori loufoque met en évidence les travers de la vie moderne et le manque de communication à l’échelle d’une famille, d’un quartier, d’une ville et plus loin encore.
Il y a des scènes jubilatoires comme la préparation de Noël. Bran se rend compte (ou pas totalement d’ailleurs) du marathon que peut représenter l’organisation de cette fête où chaque année, épuisée, Eva devait faire bonne figure devant sa petite famille d’égoïstes.
Un roman sympathique et original avec des personnages variés et des situations parfois très drôles, mais j’aurais pu me passer de bon nombre de pages où les situations s’étirent à n’en plus finir.
Un bon moment de lecture quand même.
Une citation à méditer :
Les études montraient que le cerveau des hommes était sensiblement plus gros. Une main féminine avait annoté en marge : « Alors, pourquoi ces salauds d’hypercérébrés sont-ils incapables de se servir de la brosse à chiottes ? »
